<362>voie, ma chère sœur, une sottise qui m'a passé par la tête, pour vous amuser.a Vous direz, en la lisant : Ah! qu'il est fou! Et je vous répondrai que lorsque l'on n'est pas destiné dans le monde à devenir sage, c'est peine perdue d'y prétendre, et que depuis les sept sages de la Grèce, il n'y en a plus eu. Je vous embrasse mille fois; mon cœur et mon âme sont à Baireuth, chez vous, et mon corps chétif végète ici, sur les grands chemins et dans les camps. Voilà une chienne de vie; mais ce qui m'en console, c'est qu'elle tire à sa fin. Daignez rendre justice aux sentiments d'une tendresse inviolable que je vous ai vouée jusqu'au tombeau, étant, ma très-chère sœur, etc.
346. DE LA MARGRAVE DE BAIREUTH.
Baireuth, 25 septembre 1758.
Mon très-cher frère,
Il n'y a jamais de joie sans chagrin dans ce monde; si j'avais suivi mon penchant, je vous aurais témoigné d'abord moi-même la joie que m'a causée votre dernière victoire; mais deux bras enflés et le redoublement de la toux m'en ont empêchée. Je frémis quand je pense à la fâcheuse situation où vous vous trouviez avant ce coup, et dont heureusement je ne connaissais qu'une partie. Quoi qu'il en soit, vous n'êtes pas seulement destiné à extirper, comme Hercule, les bandits qui envahissent vos États, mais encore à exterminer les monstres qui vous viennent des confins de l'univers. Mon frère n'a eu affaire qu'à de pauvres tonneliers; on dit qu'il les a battus, mais je n'en crois
a Il s'agit probablement de l'Épître à Phyllis. Faite pour l'usage d'un Suisse. Voyez t. XII, p. 95-97.