<455> de la mer après une forte tempête : les vagues sont encore émues, quoique les grands mouvements se soient calmés. J'ai trouvé mon frère Henri très-bien; je n'ai parlé d'aucune matière fâcheuse. Vous me comprenez. La plaie est trop nouvelle pour qu'on n'en réveille pas la douleur en y touchant.a Nous avons battu ici un certain Loudon, au nez de Fabius Maximus, qui, pour bien mériter ce titre, l'a laissé battre sans s'en embarrasser.b Voilà, direz-vous, un bel exploit! Que voulez-vous, ma chère sœur? c'est la farce après la tragédie. Je ne puis vous parler que d'événements. L'on s'en occupe toute la journée, et les choses qui frappent les sens y laissent plus d'impression que les réflexions. Je crains de ne vous avoir déjà que trop ennuyée. Daignez me le pardonner, et que l'amitié que vous me témoignez vous fasse supporter mon radotage en faveur des sentiments et de la tendresse avec laquelle je suis, ma très-chère sœur, etc.

20. A LA MÊME.

Glogau, 3 novembre (1759).



Ma chère sœur,

Je me suis fait traîner ici pour reprendre quelque peu de forces.c La fièvre m'a abandonné, et je compte de me mettre le 7 en marche pour la Saxe. Ne craignez rien, ma chère sœur, pour ma personne. L'amour de la patrie et le zèle pour ses intérêts me feront tout soutenir. Je crois que la paix se fera cet hiver; il y a toute apparence, et ce sera un grand bien. J'espère, après tout ce que mon frère a fait,


a Voyez t. XXVI, p. 199 et suivantes, et p. 203-205.

b Voyez t. IV, p. 236 et 237.

c Voyez t. V, p. 29.