182. A LA MÊME.
Potsdam, 3 février 1747.
Ma très-chère sœur,
Notre carnaval vient de finir, et nous avons eu plus de monde que nous n'en aurions voulu, si l'on avait eu le choix. Le prince d'Anhalt a honoré les spectacles de beaucoup d'assiduité et de sa rébarbative présence. Nous avons encore le marquis de Paulmi,1_173-b fils de d'Argenson qui vient d'être congédié, beaucoup de comtes et de nobles de l'Empire, du Danemark, de Pologne, et un mylord Dromlardine, et beaucoup d'autres que je n'ai pas été fort curieux de connaître. Nous avons reçu un admirable comédien, nommé Rosembert. Quant à la gentille pucelle que j'attends, on m'assure d'en trouver une à peu près pareille à ce que je demande, et c'est déjà beaucoup. Notre peuple de théâtre s'est augmenté de la sœur de la Barberina, de la sœur et du beau-frère de Lani,1_173-c et nous attendons l'Astrua pour le<174> mois de mars, où je donne une pastorale à la Reine douairière, à son jour de naissance, les Fêtes galantes, traduites du français. Bellavita fait les décorations, et tous nos artistes, musiciens, baladins, comédiens, chapons et poulardes, concourent à rendre ce spectacle brillant. Mon bon et gros voisin prépare, en attendant, des fêtes pour le mariage de ses enfants; il engagera la Saxe chez le juif pour faire une belle dépense. Son jésuite radote, sa femme a des maux de mère, et son petit-maître est à lier. D'ailleurs, ce sont les meilleures gens du monde;1_174-a mais comme ce sont de vilains hérétiques à brûler à tous les diables, comme dit maître François Rabelais, je ne me mêle pas de leurs affaires, et je me contente de vous réitérer les assurances de la parfaite tendresse avec laquelle je suis à jamais, ma très-chère sœur, etc.
1_173-b Voyez t. XI, p. 187, et t. XXII, p. 180, 187 et 190.
1_173-c Voyez ci-dessus, p. 138.
1_174-a Ces mots semblent être une réminiscence de l'Épître de Clément Marot au Roi, pour avoir été dérobé, vers 12 :
Au demeurant, le meilleur fils du monde.