249. DE LA MARGRAVE DE BAIREUTH.
Le 27 janvier 1752 (1753).
Mon très-cher frère,
Vos maximes et vos leçons me servent d'une grande consolation dans la triste situation où je me trouve. Elles m'ont enseigné à me mettre au-dessus des revers de la fortune, et de regarder avec fermeté les événements qui ne concernent point le cœur et l'amitié. Nous sommes ruinés de fond en comble. Le feu prit hier au soir à huit heures au château, presque en trois endroits différents. Il y a beaucoup d'apparence qu'on l'a allumé. J'étais fort malade dans mon lit; on m'a sauvée du milieu des poutres brûlantes. J'ai conservé mon chien, mes pierreries et quelques livres, et j'ignore encore ce que je possède ou ce que j'ai perdu. Le Margrave n'a rien sauvé de ses appartements. Tout le château est en cendres; on n'a préservé qu'une aile, sans quoi toute la ville était ruinée. Je suis dans une maison, sans savoir où trouver de gîte, ni où me retirer. Mais je suis tranquille, et pense qu'on peut vivre content dans l'abaissement comme dans l'abondance. Ma bibliothèque me cause le plus de peine. Je vais mener une vie fainéante; je serai privée de l'unique compagnie que j'avais. Voilà bien des jérémiades; vous les pardonnerez, mon très-cher frère, en faveur de la confusion où je me trouve. Cette con<248>fusion m'oblige de finir, étant avec tout le respect et la tendresse imaginable, mon très-cher frère, etc.