329. A LA MÊME.
Buttelstedt, 8 octobre 1757.
Ma très-chère sœur,
Pour l'amour de Dieu, ne vous rendez pas malade; vous qui voulez me tirer de mes chagrins, voudriez-vous me plonger le poignard dans le cœur? Attendons, ma chère sœur, avec patience le débrouillement de tout ceci, et ne craignez rien de ma précipitation. Lehwaldt va se mettre en chemin; il faut que je l'attende, et cela fera, si ce n'est pas davantage, un bon argument pour la nég......... J'attends aujourd'hui ou demain la réponse de R.....; ainsi l'avenir est sur le point de se débrouiller, et nous d'y voir clair. Mes gueux d'ennemis s'enfuient quand j'avance, et me suivent lorsque je me retire, mais avec tant de circonspection, que je ne saurais les atteindre; ils me rendent Fabius malgré moi, et je ne puis que leur donner quelques égratignures. J'ai ri des exhortations du patriarche Voltaire; je<348> prends la liberté de vous envoyer ma réponse.1_348-a Quant au stoïcisme, je crois en avoir plus que lui, et quant à la façon de penser, il pense en poëte, et moi comme cela me convient dans le poste où le hasard de la naissance m'a placé. Je crois que je traînerai encore, entre ici et Naumbourg, les restes languissants de ma campagne jusque vers la fin du mois, après quoi force me sera de tirer du côté de Leipzig. Adieu, ma chère, mon adorable sœur; ménagez, je vous conjure, une santé dont dépend ma vie, et ne soyez pas plus cruelle que mes implacables ennemis, en me privant de tout ce que j'ai de plus cher au monde. Je suis avec la plus vive tendresse, ma très-chère sœur, etc.
1_348-a Voyez, t. XXIII, p. 12-15, la lettre de Voltaire, no 337, et, p. 15 et 16, l'Épître de Frédéric au poëte français, datée de Buttelstedt, 9 octobre. Voyez aussi t. XIV, p. x, art. XXVII, et p. 133 et 134.