335. A LA MÊME.

Breslau, 2 janvier 1758.



Ma très-chère sœur,

J'ai été fort réjoui et surpris en même temps de recevoir ici le Mercure qui m'a réjoui par votre lettre, mon adorable sœur. J'y trouve toujours ces expressions de bonté et de tendresse qui font le bonheur de ma vie. Je n'ai point reçu la lettre dont vous me parlez, ma chère sœur, ni celle de Voltaire; il faut que malheur leur soit arrivé, ce qui peut très-facilement arriver dans ces temps de crise. Il est vrai que nos avantages ont de beaucoup surpassé nos espérances; mais quand je pense à l'avenir et au nombre des ennemis qui me restent, il me semble que ce n'en est point encore assez pour parvenir promptement à une bonne paix. Les deux régiments autrichiens qui quittent votre voisinage seront sans doute obligés de se joindre à Marschall pour couvrir le cercle de Saatz, où le maréchal Keith a fait une incursion, et qu'il menace de nouveau; d'ailleurs, la quantité de neige qui est tombée dans les montagnes met fin à toutes les opérations militaires jusqu'à ce que les approches du printemps nous permettent, comme dit Philinte, d'avoir l'honneur de nous entrecouper la gorge.1_352-a<353> Pour l'amour de Dieu, ma très-chère sœur, ménagez votre santé, et conservez vos jours pour un frère qui vous adore, et qui ne cessera d'être avec la plus haute estime, le zèle et le plus vif attachement, ma très-chère sœur, etc.


1_352-a Voyez le Glorieux. par Destouches, acte III, scène VIII.