6. DE LA MÊME.
Le 8 août 1740.
Mon très-cher frère,
Dans cet instant le Duc vient d'arriver, et qui me réjouit en me rendant votre chère lettre et le beau présent que vous avez eu la bonté d'y ajouter, et qui me fait beaucoup de plaisir, comme tout ce qui vient d'un si cher frère. Je n'ai jamais vu le Duc plus content qu'il l'a été de l'agréable séjour qu'il a fait, tant à Berlin qu'à Ruppin, Rheinsberg et Charlottenbourg. Surtout il n'a pu me louer assez toutes les grâces et l'accueil gracieux que vous lui avez faits. Je vous en remercie, mon très-cher frère, et le prends comme fait à moi-même. Je ne doute pas que tout cela fera un très-bon effet, et que cela encouragera le Duc avons témoigner de plus en plus, mon cher frère, le zèle et l'attachement qu'il a pour vous. Ferdinand est aussi très-content de l'heureux sort qu'il aura de vous servir, et, Dieu soit loué! tout est content. J'espère qu'aucun orage ne troublera la paix et la bonne union, et mon contentement sera parfait lorsque j'aurai la joie de vous revoir ici; le Duc m'en flatte, et votre chère lettre me le confirme, ainsi qu'il ne s'agit pour moi que d'avoir la patience d'attendre cet heureux jour, qui, en attendant, me paraîtra bien long avant qu'il arrive. En tout temps, soyez assuré, mon cher frère, que je suis toujours la même envers vous, et que je n'en démordrai jamais. Le Duc a trouvé Rheinsberg charmant, et n'en peut assez louer le goût. J'aurais bien voulu m'y transporter en métamorphose. On dit que vous êtes toujours le même, gai, de bonne humeur et toujours gracieux, et que c'est le règne du roi Charmant.1_386-a Le Kilian<387> Hohnstedt1_387-a a été bien réjoui de l'ordre du mérite que vous lui avez fait la grâce de donner, et il s'en pare comme un paon avec ses plumes. Enfin vous avez réjoui tout le monde, ce qui fait un bon effet pour moi. Je ne vous demande que la continuation de vos bonnes grâces, qui me sont des plus gracieuses, étant jusqu'à la fin de mes jours, avec une tendresse et un attachement inexprimable, mon très-cher frère, etc.
Je vous remercie que vous faites prier Dieu pour moi.1_387-b Les princesses d'ici seront prêtes à recevoir laquelle on donnera la pomme,1_387-c ce qui me fait beaucoup de plaisir, mon cher frère, que vous êtes dans cette intention.
1_386-a Le roi Charmant est le principal personnage du conte de l'Oiseau bleu, par la comtesse d'Aulnoy.
1_387-a Probablement le colonel de Hohnstedt, mentionné dans la lettre de Frédéric au duc Charles de Brunswic, du 28 novembre 1740.
1_387-b Par un ordre de Cabinet daté de Charlottenbourg, 26 juillet 1740, Frédéric avait chargé le ministre d'État de Brandt et le président de Reichenbach de faire faire, dans toutes les provinces, les prières publiques d'usage pour la grossesse de la duchesse de Brunswic-Wolfenbüttel, qui accoucha le 29 octobre du prince Frédéric-Auguste.
1_387-c La Duchesse parle de ses belles-sœurs, les sœurs de la reine Elisabeth, dont l'aînée, la princesse Louise, choisie pour être la femme du prince Guillaume, frère de Frédéric, arriva à Charlottenbourg, le 22 novembre 1741, comme fiancée de ce prince. Voyez ci-dessus, p. 116 et 118.