6. POURQUOI LES LIGNES NE VALENT RIEN.
S'il se trouve autant d'inconvénients à se retrancher, il en résulte naturellement que les lignes sont plus mauvaises encore. Cette mode est venue dans nos guerres modernes par le prince Louis de Bade; il en fit à Brühl, les Français en firent ensuite en Flandre, durant la guerre de succession. Je dis qu'elles ne valent rien, à cause qu'elles occupent plus de terrain qu'on n'a de troupes pour les garder; que, en formant plusieurs attaques, on est sûr de les forcer, et que par conséquent elles ne couvrent point le pays, et qu'elles ne sont bonnes qu'à faire perdre la réputation aux troupes que l'on y place.
7. COMMENT ON PEUT BATTRE L'ENNEMI A FORCES INÉGALES.
Lorsque le nombre des troupes prussiennes est inférieur aux ennemis, il ne faut pas désespérer de les vaincre; mais il faut alors que la disposition du général supplée au nombre. Les armées faibles doivent chercher des pays fourrés et montagneux, à cause que les terrains y sont tous étroits, que le nombre des ennemis, dès qu'il ne saurait les déborder, leur devient inutile et quelquefois même à charge. J'ajoute encore qu'on y appuie bien mieux les ailes d'une armée dans un terrain montueux et coupé que dans des plaines. Nous n'aurions jamais gagné la bataille de Soor, si le terrain ne nous eût favorisés, car, quoique notre nombre n'allât qu'à la moitié de celui des Autrichiens, ils ne nous débordèrent pas; ainsi le terrain remit une sorte d'égalité entre les deux armées. Ainsi ma première règle tombe sur le choix du terrain, la seconde sur la disposition de la bataille même; c'est dans ces occasions que mon ordre de bataille obliquea peut être employé très-utilement. (Plan IV.) On refuse une
a Voyez t. XXVII. III, p. 298.