<205> guerre, et tant de projets avortés firent qu'elle ne sentit plus le même éloignement ni cette aversion insurmontable pour la paix. Le style de sa chancellerie et les écrits de Ratisbonne s'adoucirent. Cependant l'aigreur et la grossièreté y reparurent aussitôt que les espérances revinrent. Tant que dura la première impression de l'infortune, l'Impératrice-Reine voulut se rapprocher du Roi, soit pour entamer une négociation, soit pour se faire une réputation de magnanimité. Le comte Kaunitz avertit le Roi d'une conspiration imaginaire formée contre lui, dans laquelle deux Napolitains et un Milanais avaient trempé. Le Roi lui fit répondre, par le comte Finck, qu'il était obligé à l'Impératrice de l'information qu'elle voulait bien lui donner; mais que comme il y avait deux manières d'assassiner, l'une par le poignard, l'autre par des écrits injurieux et déshonorants, il assurait l'Impératrice qu'il faisait peu de cas de la première, et qu'il était infiniment plus sensible à la seconde. Cela n'empêcha pas que l'indécence et le scandale de ces écrits ne continuât, et ne s'accrût même, selon que les succès de la guerre favorisèrent les armes autrichiennes. La France apprit avec un sensible chagrin les dispositions pacifiques de l'Impératrice-Reine, parce que la défection de cette princesse aurait porté un préjudice considérable à ses affaires. Tant qu'elle demeurait en guerre avec l'Angleterre sur mer et en Allemagne, Louis XV, piqué de l'affront que l'affaire de Rossbach avait imprimé à ses armes, espérait de trouver dans la continuation de la guerre l'occasion de prendre sa revanche; et les ministres de la France travaillèrent à Vienne avec une application infinie à ranimer toutes les passions calmées de cette cour. La honte, pour une grande puissance, d'être abattue par un petit prince fit le plus d'impression sur l'esprit de l'Impératrice; l'ancienne animosité contre la Prusse se réveilla, les dispositions pour la paix s'évanouirent, et les liaisons d'amitié et d'intelligence entre les cours de Vienne et de Versailles se resserrèrent plus intimement : ainsi, au lieu que les succès des Prussiens dégoû-