<254> prêtre, manquait des talents nécessaires aux souverains de Rome pour gouverner leurs États et l'Église universelle. Ses premiers pas, dès son avénement au pontificat, furent de fausses démarches; il envoya au maréchal Daun une toque et une épée bénites, pour avoir battu les Prussiens à Hochkirch, quoique de tels présents, selon l'usage de la cour romaine, ne se fassent qu'à des généraux qui ont vaincu des nations infidèles, ou dompté des peuples barbares. Cette démarche d'éclat le brouillait donc nécessairement avec le roi de Prusse, qu'il devait ménager à cause du grand nombre des sujets catholiques établis dans les États de sa domination.
Ce pape eut avec le roi de Portugal des démêlés plus indécents au sujet des jésuites. Ces pères avaient fait la guerre aux Espagnols et aux Portugais dans le Paraguay, et les avaient même battus. Depuis ces brouilleries, le roi de Portugal ne jugea plus convenable de confier les secrets de sa conscience et de son gouvernement à des membres d'une société qui avait agi comme ennemie de son royaume. Il renvoya le jésuite dont il s'était servi, et choisit un confesseur d'un autre ordre de religieux. Les jésuites, pour se venger de cet affront, qui tirait d'autant plus à conséquence, que la conduite du Roi pouvait être imitée par d'autres souverains, cabalèrent dans l'État, et excitèrent contre le gouvernement tous les grands du royaume sur lesquels ils avaient du crédit. Le père Malagrida, animé d'un zèle plus ardent, d'une haine théologale plus vive que ses confrères, parvint par ses intrigues à tramer une conspiration contre la personne du Roi, dont le duc d'Aveiro se déclara le chef. Ce duc, sachant que le Roi devait se promener en carrosse, embusqua des conjurés sur le chemin où il devait passer. Le cocher fut tué du premier coup, et de l'autre, le Roi eut le bras cassé. Longtemps après, le secret de la conjuration fut découvert par des lettres que les chefs du parti écrivaient au Brésil pour y causer un soulèvement. Le duc d'Aveiro et ses complices furent