<255> arrêtés; ils déposèrent unanimement que cet attentat leur avait été suppédité par les jésuites, instigateurs de tout ce qui venait d'arriver. Le Roi voulut faire une punition exemplaire des auteurs de cet abominable complot. Son juste ressentiment, armé des lois, soutenu par les tribunaux, devait éclater contre les jésuites. Le Pape prit leur défense, et s'y opposa ouvertement. Toutefois ces pères furent bannis du royaume; ils allèrent à Rome, où ils furent recueillis, non comme des rebelles et des traîtres, mais comme des martyrs qui avaient souffert héroïquement pour la foi. Il n'y manquait que des récompenses pour rendre la mémoire du Pape et de son pontificat plus en exécration à la postérité. Jamais la cour de Rome n'avait donné un tel scandale. Quelque vicieux que fussent les pontifes que les siècles précédents avaient détestés, aucun d'eux cependant ne s'était ouvertement déclaré le protecteur du crime et des assassinats.
La conduite peu judicieuse du Pape parut influer sur tout le clergé; la toque bénite qu'il avait envoyée au maréchal Daun, excita une effervescence de zèle bizarre chez les souverains ecclésiastiques d'Allemagne. L'électeur de Cologne entre autres publia un édit dans ses États, par lequel il défendait à ses sujets protestants, sous de grièves peines, de se réjouir des avantages que les Prussiens ou les alliés pourraient remporter sur leurs ennemis. Ce fait, qui par lui-même mérite peu d'être rapporté, mérite pourtant d'être cité, parce qu'il caractérise l'absurdité des mœurs dans un siècle où d'ailleurs la raison a fait tant de progrès. Mais ces farces, qui se passaient aux petites cours, n'attiraient sur elles que la risée ou les sifflets du public; au lieu que les passions qui agitaient les grandes cours de l'Europe, produisaient des scènes plus funestes et plus tragiques.
Nous avons vu, il n'y a pas longtemps, à Versailles l'abbé de Bernis devenir ministre des affaires étrangères, et bientôt cardinal, pour avoir signé le traité de Vienne. Tant qu'il s'agissait d'établir sa for-