<41> ses troupes avaient occupés, si les autres puissances en voulaient faire autant. Ces derniers mots étaient comme un reproche tacite aux Russes, qui avaient des armées en Pologne; ils visaient également sur le Roi, qui avait tiré un cordon de troupes depuis le pays de Crossen jusqu'au delà de la Vistule, pour garantir ses États de la peste, qui faisait alors en Pologne de grands ravages.
Dans une affaire de cette nature, il ne fallait pas se laisser décourager par des bagatelles. On pouvait prévoir que la cour de Vienne changerait de sentiments sitôt que la Russie et la Prusse seraient bien d'accord ensemble, parce que les Autrichiens préféreraient d'avoir part à ce partage aux risques de tenter les hasards de la guerre contre aussi forte partie. Ajoutez à cela que l'Impératrice-Reine, n'ayant d'allié que la France, ne pouvait alors aucunement compter sur des secours. Pour profiter de combinaisons aussi favorables, le Roi résolut de pousser l'affaire du partage; il observa le silence envers la cour de Vienne, pour lui laisser le temps de réfléchir. En même temps, le comte de Solms fut chargé d'informer les Russes que les ouvertures du traité de partage avaient été faites à Vienne, et que, quoique le prince Kaunitz eût évité jusqu'alors de s'expliquer sur ce sujet, on pouvait néanmoins prévoir qu'il y donnerait volontiers les mains, aussitôt que les deux autres puissances seraient convenues de leurs intérêts réciproques; il se servit de ce motif pour que cette affaire fût conclue plus promptement, parce qu'il n'y avait pas un moment à perdre.
Peut-être que la lenteur et la paresse habituelle des Russes aurait encore traîné la conclusion du traité en longueur, si la cour de Vienne n'eût servi le Roi sans le vouloir. Tous les jours elle faisait naître par sa médiation de nouvelles difficultés pour la paix; souvent elle chicanait avec aigreur les Russes sur leurs énormes prétentions, et s'expliquait d'un ton despotique sur les articles de la paix qu'elle rejetait, favorisant les Turcs en tout ce qui dépendait d'elle. Mais les mouve-