<5> ainsi dire, et manquant d'aides, je fus obligé de choisir de nouveaux sujets, et de les former en même temps aux emplois auxquels je les destinais.
L'armée ne se trouvait pas dans une meilleure situation que le reste du pays : dix-sept batailles avaient fait périr la fleur des officiers et des soldats; les régiments étaient délabrés, et composés en partie de déserteurs ou de prisonniers de l'ennemi. L'ordre avait presque disparu, et la discipline était relâchée au point que nos vieux corps d'infanterie ne valaient pas mieux qu'une nouvelle milice. Il fallut donc penser à recruter les régiments, à y rétablir l'ordre et la discipline, surtout à ranimer les jeunes officiers par l'aiguillon de la gloire, pour rendre à cette masse dégradée son ancienne énergie.
Le tableau que présentait la politique, n'était pas plus flatteur que ceux que nous venons d'exposer. La conduite indigne et perfide de l'Angleterre sur la fin de la dernière guerre avait rompu l'alliance que nous avions avec elle; la paix séparée qu'elle fit avec la France, les négociations qu'elle entama en Russie pour me brouiller avec l'empereur Pierre III, les avances qu'elle avait faites à la cour de Vienne pour lui sacrifier mes intérêts, toutes ces infamies, ayant dissous les liens que j'avais avec la Grande-Bretagne, me laissaient, après la paix générale, isolé et sans alliés dans l'Europe. Cette situation critique ne fut pourtant pas de durée, et sur la fin de l'année 1763, elle prit une forme plus favorable. La cour de Russie avait été comme étourdie par la révolution subite qui s'y était faite; il lui fallait