<79> Autrichiens et des Prussiens ne purent convenir de rien, pas même des lieux qui devaient fixer les limites des frontières. Le prince Kaunitz demanda la médiation de la Russie et de la Prusse; mais les esprits, dans ces cours, étaient trop aigris pour qu'elle pût lui être accordée, et quoique l'impératrice Thérèse et le Roi gardassent leurs extensions, ils n'en purent obtenir de la République la cession légale.
Il résulte donc, d'après tout ce que nous venons d'exposer, que l'Europe n'était pas dans une situation stable et jouissante d'une paix assurée : partout le feu couvait sous la cendre. Au sud de l'Europe, on pouvait prévoir que la guerre civile des Anglais avec leurs colonies pouvait devenir générale, pour peu que la France et l'Espagne y prissent part. Il en était de même du traité de partage, qui pouvait occasionner de nouveaux troubles, si la sanction de la république de Pologne ne le confirmait. Il en était de même de la paix entre les Russes et les Turcs, dont les conditions avaient paru si révoltantes à Constantinople, qu'il semblait que l'intérêt du bien public devait rompre ce que la nécessité avait fait conclure. La révolution en Suède laissait également des germes de mécontentement dans le Nord. Mais surtout que ne devait-on pas attendre de l'ambition démesurée d'un jeune empereur, secondée par les intrigues et les perfidies d'un ministre qui se faisait un point d'honneur de tromper ceux avec lesquels il était en négociation? Toutes ces considérations obligeaient les souverains prudents à demeurer sur leurs gardes, à se maintenir bien armés, et à ne pas détourner les yeux d'affaires qui pouvaient s'embrouiller au moment où l'on s'y attendrait le moins. Il semble, en parcourant l'histoire, que les vicissitudes et les révolutions soient une des lois permanentes de la nature : tout, dans ce monde, est sujet au changement; et cependant des fous s'attachent aux objets de leur ambition et les idolâtrent, et ils ne se détrompent point des illusions de cette lanterne magique qui sans cesse se repro-