<147> plus graves que celle du barreau, elle se conduit néanmoins par de semblables principes, et donne souvent à gémir aux bonnes âmes du choix peu judicieux des arguments qu'elle emploie, faute de jugement, sans doute, de la part de l'orateur, qui par là donne malheureusement beau jeu aux esprits contentieux et difficiles, qu'on ne satisfait ni par un raisonnement lâche ni par de pompeuses paroles. Ce clinquant, ces subtilités, ces raisonnements superficiels, rien de tout cela n'est admis dans l'argumentation austère et rigoureuse des bons philosophes : ils ne veulent convaincre que par l'évidence et la vérité, ils examinent un système d'un esprit équitable et impartial, ils en apportent les preuves sans les déguiser ou les affaiblir, ils épuisent toutes les raisons pour le défendre; après quoi ils font de tout aussi grands efforts pour le combattre. Ils résument enfin le nombre des probabilités favorables ou contraires; et comme en ces matières il est rare de trouver une entière évidence, la crainte de prononcer un jugement téméraire tient leur esprit en suspens. Si l'homme est un animal raisonnable, comme l'école nous en assure, les philosophes doivent être plus hommes que les autres; aussi les a-t-on toujours considérés comme les précepteurs du genre humain; et leurs ouvrages, qui sont le catéchisme de la raison, ne sauraient assez se répandre pour l'avantage de l'humanité.