<155> qui servirent de marchepied au trône des pontifes, d'où, depuis, ils dictèrent impérieusement leurs lois aux nations consternées.

Avant d'arriver à ce point de grandeur, l'Église passa par différentes formes. Le gouvernement républicain dura pendant les trois premiers siècles. Depuis que l'empereur Constantin eut embrassé le christianisme, il s'éleva une espèce d'aristocratie dont les Empereurs, les papes et les patriarches principaux étaient les chefs. Cette administration éprouva, par la suite, les révolutions auxquelles tous les ouvrages humains sont sujets. Lorsque les ambitieux se trouvent en concurrence de pouvoir et de prétentions, ils n'épargnent ni ruses ni artifices pour se supplanter, et les plus fourbes l'emportent à la longue sur leurs rivaux. Ces fourbes furent les papes : ils profitèrent de l'état de langueur où se trouvait l'empire d'Orient, pour usurper l'autorité des Césars, et pour faire passer les droits de la couronne impériale à la tiare des pontifes. Grégoire III, surnommé le Grand,a fut le premier qui tenta de telles entreprises. Le pape Étienne, qui suivait le même projet, fit quelques pas de plus dans cette carrière. Chassé de Rome par Astolphe, roi des Lombards, il passa en France, où il couronna l'usurpateur Pepin, à condition qu'il délivrât Rome des Lombards. Le pape, de retour à Rome, pour presser les secours qu'il attendait de France, écrit une lettre au roi qu'il a couronné au nom de la Vierge, de saint Pierre et de tous les saints, dans laquelle il le menace de la condamnation éternelle, s'il ne le délivre au plus tôt des Lombards qui l'accablaient. Il avait donné le royaume de France, sur lequel il n'avait aucun droit, à Pepin, et Pepin lui donna, à ce qu'il prétendit, Rome et son territoire, qui appartenait proprement aux empereurs de Constantinople. Depuis, Charlemagne fut couronné à Rome par le pape, non qu'il crût tenir la couronne du


a C'est Grégoire Ier, et non pas Grégoire III, qui fut surnommé le Grand. Dans son Abrégé de l'Histoire ecclésiastique de Fleury. A Berne, 1766, t. I, p. 178 et 179, le Roi donne, à la date de l'an 731, deux fragments des insolentes lettres que Grégoire III adressa à l'Empereur.