<159> se corrompirent de plus en plus; et la morale chrétienne, si sainte et si pure, entièrement mise en oubli, vit élever sur ses ruines le culte extérieur et des pratiques superstitieuses. Les trésors de l'Église étaient-ils épuisés, on mettait le paradis à l'encan, ce qui enrichissait la daterie. Les papes voulaient-ils faire la guerre à quelque souverain dont ils étaient mécontents, on prêchait la croisade contre lui, on avait des troupes, et l'on se battait. Le saint-siége voulait-il perdre quelque prince, on le déclarait hérétique, excommunié; c'était le mot de ralliement qui attroupait tout le monde contre lui. C'est par de telles entreprises que le joug despotique des papes s'appesantissait. Les grands de la terre, excédés de ce joug, auraient voulu le secouer; mais ils ne l'osaient. La plupart ne jouissaient que d'une autorité mal affermie, et la multitude de leurs sujets, plongés dans l'ignorance la plus profonde, étaient comme liés et garrottés par les chaînes de la superstition. Quelques génies supérieurs à leur siècle tentèrent à la vérité de dessiller les yeux fascinés des peuples, et de les éclairer à la faible lueur des doutes; mais la tyrannie de l'Église rendait vains tous leurs efforts : ils avaient à braver des juges qui étaient leurs parties, les persécutions, les cachots, les outrages, et les flammes qui s'élevaient déjà des bûchers de l'inquisition. Pour achever le tableau de ces temps de vertige et d'abrutissement, qu'on y ajoute le luxe et le faste des évêques, qui semblait insulter à la misère publique; la vie scandaleuse et les crimes atroces de tant de papes qui donnaient un démenti ouvert à la morale évangélique; la rémission des péchés vendue à l'enchère, qui prouvait évidemment que l'Église trahissait, pour s'enrichir, tout ce que la religion a de plus saint. Enfin les pontifes abusèrent d'un pouvoir fondé sur la crédulité des hommes, de même que nous avons vu des nations abuser de leur crédit idéal. Tous ces matériaux amassés furent les causes qui préparèrent la réforme.
Pour ne rien omettre, nous devons rapporter une circonstance qui en facilita l'ouvrage. Depuis le concile de Bâle, où l'empereur