<27> d'être prévenue des premières opinions qu'on lui inculque. Tout autre disciple aurait adopté les sentiments de son maître; ce n'en fut pas assez pour le jeune La Mettrie : il devint janséniste, et composa un ouvrage qui eut vogue dans le parti.
En 1725, il étudia la physique au collége d'Harcourt, et y fit de grands progrès. De retour en sa patrie, le sieur Hunault, médecin de Saint-Malo, lui conseilla d'embrasser cette profession : on persuada le père; on l'assura que les remèdes d'un médecin médiocre rapportaient plus que les absolutions d'un bon prêtre. D'abord le jeune La Mettrie s'appliqua à l'anatomie; il disséqua pendant deux hivers; après quoi il prit, en 1725, à Reims le bonnet de docteur, et y fut reçu médecin.
En 1733, il fut étudier à Leyde sous le fameux Boerhaave. Le maître était digne de l'écolier, et l'écolier se rendit bientôt digne du maître. M. La Mettrie appliqua toute la sagacité de son esprit à la connaissance et à la cure des infirmités humaines; et il devint grand médecin dès qu'il voulut l'être. En 1734, il traduisit, dans ses moments de loisir, le traité du Feu, de M. Boerhaave, son Aphrodisiacus, et y joignit une dissertation sur les maladies vénériennes, dont lui-même était l'auteur. Les vieux médecins s'élevèrent en France contre un écolier qui leur faisait l'affront d'en savoir autant qu'eux. Un des plus célèbres médecins de Paris lui fit l'honneur de critiquer son ouvrage, marque certaine qu'il était bon. La Mettrie répliqua; et pour confondre d'autant plus son adversaire, en 1736 il composa un traité du Vertige, estimé de tous les médecins impartiaux.
Par un malheureux effet de l'imperfection humaine, une certaine basse jalousie est devenue un des attributs des gens de lettres; elle irrite l'esprit de ceux qui sont en possession des réputations, contre les progrès des naissants génies; cette rouille s'attache aux talents sans les détruire, mais elle leur nuit quelquefois. M. La Mettrie, qui avan-