<235> voisins plus puissants qu'eux se mêlent d'abord de leurs démêlés, et leur offrent une médiation qu'il ne dépend pas d'eux de refuser; ainsi, au lieu de sang répandu, deux coups de plume terminent leurs petites querelles.
A quoi leur serviraient donc leurs forteresses? Quand même elles seraient en état de soutenir un siége de la longueur de celui de Troie contre leurs petits ennemis, elles n'en soutiendraient pas un comme celui de Jéricho devant les armées d'un roi ou d'un monarque puissant. Si, d'ailleurs, de grandes guerres se font dans leur voisinage, il ne dépend pas d'eux de rester neutres, ou ils sont totalement ruinés; et s'ils embrassent le parti d'une des puissances belliqueuses, leur capitale devient la place de guerre de ce prince.
Victor-Amédée, infiniment supérieur par sa puissance à l'ordre des princes desquels nous venons de parler, éprouva dans toutes les guerres d'Italie un sort très-fâcheux pour ses forteresses; Turin éprouva même comme un flux et reflux de domination tantôt française et tantôt impériale.
L'avantage des villes ouvertes est qu'en temps de guerre personne ne s'en embarrasse, qu'on les regarde comme inutiles, et qu'ainsi on en laisse tranquillement la possession à ceux à qui elles appartiennent.
L'idée que Machiavel nous donne des villes impériales d'Allemagne est toute différente de ce qu'elles sont à présent; un pétard suffirait, et au défaut de celui-là un mandement de l'Empereur, pour le rendre maître de ces villes. Elles sont toutes mal fortifiées, la plupart avec d'anciennes murailles flanquées en quelques endroits par de grosses tours, et entourées par des fossés que des terres écroulées ont presque entièrement refermés. Elles ont peu de troupes, et celles qu'elles entretiennent sont mal disciplinées; leurs officiers sont, ou le rebut de l'Allemagne, ou de vieilles gens qui ne sont plus en état de servir. Quelques-unes de ces villes impériales ont une assez bonne artillerie;