<304>nement sage, est heureux, abondant et riche, c'est lorsque les beaux-arts et les sciences naissent en son sein : ce sont des fleurs qui viennent dans un terrain gras et sous un ciel heureux, mais que la sécheresse ou le souffle impétueux des aquilons fait mourir.
Rien n'illustre plus un règne que les arts qui fleurissent sous son abri. Le siècle de Périclès est aussi fameux par Phidias, Praxitèle, et tant d'autres grands hommes qui vivaient à Athènes, que par les batailles que ces mêmes Athéniens remportèrent alors. Celui d'Auguste est plus connu par Cicéron, Ovide, Horace et Virgile que par les proscriptions de ce cruel empereur, qui doit, après tout, une grande partie de sa réputation à la lyre d'Horace. Celui de Louis le Grand est plus célèbre par les Corneille, les Racine, les Molière, les Boileau, les Des Cartes, les Coypel, les Le Brun, les Ramondon, que par ce passage du Rhin tant exagéré, par ce siége de Mons où Louis se trouva en personne, et par la bataille de Turin, que M. de Marsin fit perdre au duc d'Orléans par ordre du cabinet.
Les rois honorent l'humanité lorsqu'ils distinguent et récompensent ceux qui lui font le plus d'honneur; et qui serait-ce, si ce ne sont de ces esprits supérieurs qui s'emploient à perfectionner nos connaissances, qui se dévouent au culte de la vérité, et qui négligent ce qu'ils ont de matériel pour rendre plus accompli en eux l'art de la pensée? De même que des sages éclairent l'univers, ils mériteraient d'en être les législateurs.
Heureux sont les souverains qui cultivent eux-mêmes ces sciences, qui pensent avec Cicéron, ce consul romain, libérateur de sa patrie et père de l'éloquence : « Les lettres forment la jeunesse, et font les charmes de l'âge avancé. La prospérité en est plus brillante; l'adversité en reçoit des consolations; et dans nos maisons, dans celles des autres, dans les voyages, dans la solitude, en tout temps, en tous lieux, elles font la douceur de notre vie. »a
a Vovez ci-dessus, p. 156.