<333> bouleverser tant de grands empires; une alliance sagement projetée et une guerre vivement entreprise auraient fait avorter ces desseins ambitieux dont l'accomplissement enchaîna l'univers.
La prudence veut que l'on préfère les petits maux aux plus grands, et que l'on agisse tandis qu'on en est maître. Il vaut donc mieux de s'engager dans une guerre offensive lorsqu'on est libre d'opter entre la branche d'olive et la branche de laurier, que d'attendre jusqu'à ces temps désespérés où une déclaration de guerre ne peut que retarder de quelques moments l'esclavage entier et la ruine. Quoique cette situation soit fâcheuse pour un souverain, il ne saurait cependant mieux faire que de se servir de ses forces avant que les arrangements de ses ennemis, lui liant les mains, lui en fassent perdre le pouvoir. Les alliances peuvent aussi engager les princes à entrer dans les guerres de leurs alliés en leur fournissant le nombre de troupes auxiliaires dont ils sont convenus par les traités. Comme les souverains ne sauraient se passer d'alliances, puisqu'il y en a peu ou point qui puissent se soutenir par leurs propres forces, ils s'engagent à se donner un secours mutuel en cas de besoin, et à s'assister réciproquement par un nombre de troupes déterminé; ce qui contribue à leur conservation ainsi qu'à leur sûreté. C'est donc l'événement qui décide lequel des alliés retirera les fruits de l'alliance. Mais comme l'occasion qui favorise une des parties contractantes dans un temps peut de même favoriser celui qui donne les auxiliaires dans d'autres conjonctures, il est de la sagesse des princes d'observer religieusement la foi des traités, et de les remplir même scrupuleusement, d'autant plus que l'intérêt de leurs peuples est que de pareilles alliances rendent plus efficace la protection des souverains, en rendant leur puissance plus redoutable à leurs ennemis.
Toutes les guerres donc qui seront entreprises, après un examen rigoureux, pour repousser des usurpateurs, pour maintenir des droits légitimes, pour garantir la liberté de l'univers, et pour éviter l'op-