<183>Il a presque copié littéralement le système de la fatalité tel que Leibniz l'expose et que Wolff l'a commenté. Je crois, pour bien s'entendre, qu'il faut définir l'idée qu'on attache à la liberté. J'entends par ce mot tout acte de notre volonté qui se détermine par elle-même et sans contrainte. Ne pensez pas qu'en partant de ce principe je me propose de combattre en général et en tout point le système de la fatalité; je ne cherche que la vérité, je la respecte partout où je la trouve, et je m'y soumets quand on me la montre. Pour bien juger de la question, rapportons l'argument principal de l'auteur. Toutes nos idées, dit-il, nous viennent par les sens et par une suite de notre organisation; ainsi toutes nos actions sont nécessaires. On convient avec lui que nous devons tout à nos sens comme à nos organes; mais l'auteur devait s'apercevoir que des idées reçues donnent lieu à des combinaisons nouvelles. Dans la première de ces opérations l'âme est passive, dans la seconde elle est active. L'invention et l'imagination travaillent sur des objets que les sens nous ont appris à connaître : par exemple, comme, lorsque Newton apprit la géométrie, son esprit était patient, il recueillait des notions; mais lorsqu'il parvint à ses découvertes étonnantes, il était plus qu'agent, il était créateur. Il faut bien distinguer dans l'homme les différentes opérations de l'esprit, esclave dans celles où l'impulsion domine, et très-libre dans celles où son imagination agit. Je conviens donc avec l'auteur qu'il y a un certain enchaînement de causes dont l'influence agit sur l'homme et le domine par reprises. L'homme reçoit en naissant son tempérament, son caractère avec le germe de ses vices et de ses vertus, une portion d'esprit qu'il ne peut ni resserrer ni étendre, des talents ou du génie, ou de la pesanteur et de l'incapacité. Aussi souvent que nous nous laissons emporter à la fougue de nos passions, la fatalité, victorieuse de notre liberté, triomphe; aussi souvent que la force de la raison dompte ces passions, la liberté l'emporte.
Mais l'homme n'est-il pas très-libre quand on lui propose diffé-