<206> les grands hommes qui avaient illustré la république. Que chacun se demande dans quel temps il aurait voulu naître à Athènes ou à Rome : sans doute qu'il choisira ces époques brillantes.
Une affreuse barbarie succéda à ces temps de gloire; un débordement de peuples féroces couvrit presque toute la face de l'Europe. Ils amenèrent avec eux les vices et l'ignorance, qui préparèrent les voies à la superstition la plus outrée. Ce ne fut qu'après onze siècles d'abrutissement que la terre put se dégager de cette rouille; et dans cette renaissance des lettres, on fait plus de cas des bons auteurs qui les premiers illustrèrent l'Italie, que de Léon X, qui les protégea. François Ier, jaloux de cette gloire, voulut la partager : il fit des efforts inutiles pour transplanter ces plantes étrangères dans un sol qui n'était point encore préparé pour elles; et ce ne fut qu'à la fin du règne de Louis XIII et sous celui de Louis XIV que commença ce beau siècle où tous les arts et toutes les sciences s'acheminèrent, d'une marche égale, au point de perfection où il est permis aux hommes d'atteindre. Depuis, les différents arts se répandirent partout. Le Danemark avait déjà produit un Tycho Brahé, la Prusse un Copernic; l'Allemagne se glorifia d'avoir donné le jour à Leibniz. La Suède aurait également augmenté la liste de ces hommes célèbres, si les guerres perpétuelles où cette nation se trouvait engagée alors n'avaient pas nui aux progrès des arts.
Tous les princes éclairés ont protégé ceux dont les savants travaux ont honoré l'esprit humain, et les choses, de nos jours, en sont venues au point que, pour peu qu'un gouvernement européen négligeât d'encourager les sciences, il se trouverait bientôt arriéré d'un siècle à l'égard de ses voisins; la Pologne en fournit un exemple palpable.
Nous voyons une grande impératrice se faire un point d'honneur d'introduire et d'étendre les connaissances dans ses vastes États, et traiter comme une affaire importante tout ce qui peut y contribuer.
Qui ne serait ému et touché en apprenant l'honneur qu'on rend