<113>Reventlow qui les commandait, y fut surpris par le grand prieur de Vendôme. Le prince Eugène pouvait être battu : mais il savait réparer ses pertes en grand homme; et l'échec de Cassano fut bientôt oublié par le gain de la fameuse bataille de Turin, auquel les Prussiens eurent une part principale.

Quoique le duc d'Orléans proposât aux Français de sortir de leurs retranchements, son avis ne fut point suivi : La Feuillade et Marsin avaient des ordres de la cour qui portaient, à ce qu'on assure, de ne point hasarder de bataille; celle de Höchstädt avait intimidé le conseil de Louis XIV. Les Français, qui auraient été du double supérieurs aux alliés, s'ils les avaient attaqués hors de leurs retranchements, leur furent inférieurs partout, à cause que les quartiers différents qu'ils avaient à défendre, étaient d'une étendue immense, et de plus séparés par la Doire. Les Prussiens, qui avaient l'aile gauche de l'armée des alliés, attaquèrent la droite du retranchement français qui s'appuyait à la Doire : le prince d'Anhalt était déjà au bord du fossé, et la résistance des ennemis ralentissait la vigueur de son attaque, lorsque trois grenadiers se glissèrent le long de la Doire, et tournèrent le retranchement par un endroit où il n'était pas bien appuyé à cette rivière. Tout d'un coup une voix s'entendit dans l'armée française : « Nous sommes coupés! » Elle abandonne son poste, prend la fuite; et en même temps le prince d'Anhalt escalade le retranchement, et gagne la bataille. Le prince Eugène en fit un compliment au Roi; l'éloge de ses troupes devait lui faire d'autant plus de plaisir, qu'il partait d'un prince qui devait bien s'y connaître.

Frédéric Ier fit pendant cette guerre quelques acquisitions pacifiques : il acheta le comté de Tecklenbourg, en Westphalie, du comte de Solms-Braunfels; et madame de Nemours, qui était en possession de la principauté de Neufchâtel, venant de mourir, le conseil d'État de Neufchâtel prit la régence, et élut quelques-uns de ses membres pour juger des prétentions que le roi de Prusse formait d'un côté, et tous les parents de la maison de Longueville d'un autre. La principauté de Neufchâtel fut adjugée au Roi, comme ayant les meilleurs droits en qualité d'héritier de la maison d'Orange. Louis XIV s'éleva contre cette sentence : mais il avait de si grands intérêts à discuter, qu'ils firent évanouir