<150>et Philippe V céda Gibraltar et Port-Mahon à l'Angleterre, à condition que le roi George ne se mêlerait plus des affaires d'Italie.

A Vienne, on était mécontent et envieux des avantages dont jouissait le roi de Prusse. La maison d'Autriche voulut que les princes d'Allemagne, qu'elle regarde comme ses vassaux, la servissent contre ses ennemis, et non pas qu'ils fissent usage de leur force pour leur propre agrandissement. Le Grand Électeur avait secondé l'Empereur, à cause que leurs intérêts étaient souvent liés ensemble. Le roi Frédéric Ier l'avait secouru, tant par ses préjugés, qu'afin d'être reconnu roi de Prusse. Frédéric-Guillaume, qui n'avait ni préjugés ni intérêts qui jusqu'alors l'attachassent à la maison d'Autriche, ne lui fournit point de secours dans les guerres de Hongrie ni de Sicile. Il n'était lié avec l'Empereur par aucun traité; et de plus il s'excusa, sous prétexte qu'il avait à craindre des entreprises nouvelles de la part des Suédois. Dans le fond, il était trop clairvoyant pour forger ses propres chaînes, en travaillant à l'agrandissement de la maison d'Autriche, qui aspirait en Allemagne à une domination absolue.

La politique sage et mesurée de Frédéric-Guillaume se tournait entièrement à l'arrangement intérieur de ses États. Il avait établi sa résidence à Potsdam, maison de plaisance qui originairement n'était qu'un chétif hameau de pêcheurs. Il en fit une belle et grande ville, où fleurirent toutes sortes d'arts, depuis les plus communs jusqu'à ceux qui servent au raffinement du luxe. Des Liégeois qu'il avait attirés par ses libéralités, y établirent une manufacture d'armes, qui fournit non seulement l'armée, mais encore les troupes de quelques puissances du Nord. On y fabriqua bientôt des velours aussi beaux que ceux de Gênes. Tous les étrangers qui possédaient quelque industrie, étaient reçus, établis et récompensés à Potsdam. Le Roi établit dans cette ville, dont il était le fondateur, un grand hôpital, où sont entretenus annuellement deux mille cinq cents enfants de soldats, qui peuvent apprendre toutes les professions auxquelles leur génie les détermine. Il établit de même un hôpital de filles, qui sont élevées aux ouvrages convenables à leur sexe. Par ces arrangements charitables, il soulagea la misère des soldats chargés de famille, et il procura une bonne éducation à des enfants auxquels les pères