<208>l'esprit de parti, le fanatisme et un excès d'aveuglement ne les précipitent jamais dans des guerres dont la fureur est le partage, et que des chrétiens ne devraient jamais se faire!
En regardant la religion simplement du côté de la politique, il paraît que la protestante est la plus convenable aux républiques et aux monarchies; elle s'accorde le mieux avec cet esprit de liberté qui fait l'essence des premières : car, dans un État où il faut des négociants, des laboureurs, des artisans, des soldats, des sujets en un mot, il est sûr que des citoyens qui font vœu de laisser périr l'espèce humaine, deviennent pernicieux. Dans les monarchies, la religion protestante, qui ne relève de personne, est entièrement soumise au gouvernement : au lieu que la catholique établit un État spirituel, tout puissant, fécond en complots et en artifices, dans l'État temporel du prince; que les prêtres, qui dirigent les consciences et qui n'ont de supérieur que le pape, sont plus maîtres des peuples que le souverain qui les gouverne; et que, par une adresse à confondre les intérêts de Dieu avec l'ambition des hommes, le pape s'est vu souvent en opposition avec des souverains, sur des sujets qui n'étaient aucunement du ressort de l'Église.
Dans le Brandebourg et dans la plupart des provinces de l'Allemagne, le peuple portait impatiemment le joug du clergé romain : c'était une religion trop onéreuse pour des pays aussi peu opulents; le purgatoire, la messe des morts et des vivants, le jubilé, les annates, les indulgences, les péchés véniels et mortels, les pénitences changées en amendes pécuniaires, les affaires matrimoniales, les vœux, les offrandes, étaient autant d'impôts que le pape levait sur la crédulité, et qui lui donnaient des revenus aussi solides que le Mexique en fournit à l'Espagne. Ceux qui les payaient étaient épuisés et mécontents; il n'était donc pas même nécessaire d'employer l'évidence des arguments, pour disposer ces esprits à recevoir la réforme; ils criaient contre le clergé qui les opprimait; un homme vint, qui promit de les en délivrer, et ils le suivirent.
Joachim II fut le premier électeur qui embrassa la religion luthérienne; sa mère, qui était une princesse de Danemark, lui communiqua ses sentiments, car la nouvelle doctrine avait péné-