<245>L'heureux Gustave-Adolphe et le Grand Électeur.
Là, sortant fraîchement de la main du sculpteur,
On voit une statue élégante et nouvelle;
Son front est ombragé d'une palme immortelle :
C'est ce fameux Saxon, le héros des Français,
Que la mort dans son lit abattit de ses traits.a
Venez, jeunes guerriers, voici l'Expérience :
Par d'immenses travaux elle acquit la science;
Son front est ombragé de cheveux blanchissants,
Ses membres recourbés sentent le poids des ans,
Son corps cicatrisé, tout couvert de blessures,
Du temps qui nous détruit affronte les injures.
Présente à tous les faits, présente à tous les lieux,
Elle instruit les esprits de ce qu'ont vu ses yeux;
Elle vous fera voir, dans la guerre punique,
Par quel coup Scipion sauva Rome en Afrique,
A Carthage effrayée attirant Annibal,
Le força de combattre en son pays natal;
Un général vulgaire, un moins vaste génie,
Satisfait d'accourir aux champs de l'Ausonie,
Peut-être eût défendu son pays ravagé;
Il eût sauvé l'État, mais ne l'eût point vengé.
La discorde, en troublant la maîtresse du monde,
Dans les divers partis en héros fut féconde :
Voyez Sertorius, qu'on ne peut accabler,
Avancer à propos, quelquefois reculer.
Assuré par l'appui des rochers d'Ibérie,
Arrêter des Romains la valeur aguerrie;
Tant un génie heureux qui possède son art
Des destins de la guerre écarte le hasard!
Un guerrier plus ardent, moins sage et moins habile,
De l'âpreté des monts quittant le sûr asile,
Eût cherché ses rivaux, qui dans leurs camps nombreux
Amenaient la fortune et Pompée avec eux.
Ici, le grand Condé, fils chéri de Bellone,
De la France étonnée assure la couronne;


a Voyez ci-dessus, p. 226.