<50>Hélas! tandis que le faible vulgaire,
Qui sans penser languit dans la misère,
Traîne ses jours et son nom avili,
Sortant de ce songe,
Pour jamais se plonge
Dans un sombre oubli;
Tu vois déjà ta mémoire estimée,
Et dans son vol la prompte renommée
Ne publier que ta prose et tes vers;
Tu reçois l'hommage
(Qu'importe à quel âge?)
De tout l'univers.
Ces vils rivaux dont la cruelle envie
Avait versé ses poisons sur ta vie,
Que tes vertus ont si fort éclipsés,
Vrais pour ta mémoire,
A chanter ta gloire
Se verront forcés.
Quel avenir t'attend, divin Voltaire!
Lorsque ton âme aura quitté la terre,
A tes genoux vois la postérité :
Le temps qui s'élance
Te promet d'avance
L'immortalité.
(La réponse que Voltaire fit à cette ode, le 3 octobre 1751 [à Potsdam],
se trouve dans les Œuvres de Voltaire, édition Beuchot, t. LV, p. 676,
et t. XII, p. 530.)