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LE MIRACLE MANQUÉ, CONTE.

Je veux chanter sur ma vielle profane
Un conte vrai qui surpasse Peau-d'âne.
Objets usés que nos tendres aïeux
Trouvaient si beaux, à présent chassieux,
Je vous implore, éternelles grand'mères
Que chaque hiver assemble autour des feux,
Dignes suppôts des contes merveilleux.
Et vous aussi, mesdames les sorcières,
Dans ce beau champ conduisez-moi des yeux;
Et vous surtout dont l'art et la puissance
Força l'enfer, et frappa dans Endora
Les yeux d'un roi, par un prophète mort.
Messieurs les saints, souffrez par bienséance
Que je vous place ici selon le tour.
O vous, des cieux les sombres interprètes,
Doubles fripons, menteurs et pis, prophètes,
Enseignez-moi les captieux discours
Dont vous saviez fabriquer vos oracles;
Je dois ici célébrer les miracles
D'un preux cafard, cagot et triple saint,
Vieux vétéran, maquignon de Calvin.


a I Samuel, chap. 28, versets 7-19.