<105>En espérant on va jusqu'au vingtième;
Mais pas un mot que le bon saint leur dit,
Pour le malheur du mort, ne s'accomplit.
Et quelle fut l'abattement énorme,
Lorsque, voulant juger du fait en forme,
Jusques au fond le cas s'approfondit!
Quelqu'un du mort leva la couverture;
Ciel! il sentit .... fais-en la conjecture,
Ami lecteur; je sais que tu m'entends,
Et volontiers de cette idée impure
Je veux ici t'épargner la peinture.
Bref, on vit bien qu'il était enfin temps
Que le bon mort fût mis en sépulture,
Et le cafard, malheureux en augure,
Devint, depuis, la fable des parents.
Lorsqu'une fois on est en train de croire,
L'esprit se plie à toute absurdité;
La fable alors passe pour vérité,
Et le mensonge est égal à l'histoire;
On s'étourdit, on reçoit toute erreur
Qu'un cerveau creux engendra par boutade :
Quand une fois le bon sens bat chamade,
Adieu raison, à jamais serviteur!
Corrigé à Potsdam, 28 octobre 1749. (Envoyé à Voltaire le 3 mai, à Algarotti
le 19 mai 1740.)