<12>Il tient état, sa maison est brillante :
C'est un seigneur qu'on ne peut trop aimer. »
Ce gros Crésus, qui paraît inutile,
A tous les arts donne occupation,
Et de là vient qu'on le chérit en ville;
La dépense est sa forte passion,
Son luxe au moins fait vivre l'industrie :
Là le burin travaille l'orfévrie,
Le peintre vit de sa profusion,
Et l'architecte orne sa galerie;
Il met l'argent en circulation,
Et sa maison vaut une hôtellerie.
Quand Vadius, d'un ton de flatterie,
Vient louanger l'inepte Bavius,
Le doux espoir sur lequel il se fonde,
C'est d'emprunter de lui nombre d'écus.
Oui, l'intérêt est le roi de ce monde,
Il règle tout dans ce siècle falot;
En enrageant, le malheureux le fronde,
Mais qui n'a rien fait le rôle d'un sot.
Un vrai Platon, vivant dans la misère,
Ne recevrait qu'humiliants rebuts;
Mais l'opulent Matthieu, dit l'Insectaire,
A des respects et très-humbles saluts.
Ce cher métal, ce beau don de Plutus
Peut tenir lieu de rang et de noblesse;
Il donne au sot esprit, bon sens, vertus,
Nombre d'amis, maîtresses encor plus;
Par sa vertu vraiment enchanteresse,
Aucun richard n'essuya des refus.
Au bon vieux temps où florissaient nos pères,
Le sentiment formait le nœud des cœurs;
Les passions alors étaient sincères,
L'or n'avait point pu corrompre nos mœurs.
L'amour tout seul possédait son empire,
Savoir aimer, c'était l'art de séduire,
Pour tout présent on donnait quelques fleurs,