<208>Ayez, seigneur, pitié de ma vertu. »
Disant ces mots, tout un torrent de larmes
De son visage inondait tous les charmes.
Franquin s'écrie : « Ah! qu'on fasse cocu
Ce prétendu, ce jeune époux en herbe!
Allons, jetez dans ce moule superbe
Jeune Français bien ourdi, bien cossu. »
Dessus l'amour le bon Darget prélude;
Il en sentait toute la plénitude.
Dans le moment qu'il était résolu
De s'enivrer de sa béatitude,
Son bon patron, s'en étant aperçu,
L'arrêta court, et le badaud rengaine,
Entre ses dents pestant sur saint Étienne.
Tel, près d'un lac, souvent un limaçon
De sa maison sort sa tête gentille,
Au grand soleil rampe dans le limon;
Mais s'il entend du bruit ou quelque son,
Se repliant soudain dans sa coquille,
Il se resserre en petit peloton :
Ainsi Darget à l'âme généreuse
Vit dissiper certain malin démon
Que poliment on nomme Cupidon,
Et dont Moïse, en sa Bible causeuse,
Fit un serpent, dont Ève curieuse,
Pour son malheur, essaya tout du long.
Le bon Darget, plus froid qu'aucun glaçon,
Dit à sa belle : « Aimable malheureuse,
De vos vertus je prends compassion;
Je suis, hélas! pour le viol maussade,
Ne craignez point de moi quelque enfilade;
Je payerai plutôt votre rançon. »
Il prend sa main, la rassure et console.
Franquin, qui voit Darget se refroidir,
Dit : « Est-ce en France ainsi que l'on viole?
Eh! quand au fait voudrez-vous donc venir? »
- « Hélas! seigneur, nos tristes destinées