<24>Tel est le sort des frivoles appas
Dont la beauté fait l'unique partage;
Mais croyez-moi, respectable Camas,
Votre vertu vous sauve du naufrage.
Qu'importe enfin que l'âge destructeur
De vos attraits ternisse la fraîcheur?
C'est attaquer la moitié de vous-même;
Mais votre esprit, que j'estime et que j'aime,
A vos attraits est bien supérieur.
Bravez le temps et sa rage insolente :
Il ne peut rien sur votre belle humeur,
Ni sur votre âme impassible et constante.
Vous méprisez la sotte gravité
Dont à la cour s'enfle une gouvernante;
Votre sagesse est toujours indulgente,
Et votre esprit rappelle la gaîté
Dans les ennuis d'une cour indolente.
Bien plus encor, vous êtes par piété
Bonne huguenote et pourtant tolérante;
Après ce trait, adorable Camas,
Ah! quel mortel ne vous aimerait pas?
Les ignorants vous jugent ignorante,
Et les savants vous prennent pour savante;
Vous vous pliez avec facilité
Au goût, aux mœurs de la société,
Vous savez rire et plaire à la jeunesse,
L'âge sensé prise votre sagesse,
Et, complaisante et pleine de bonté,
Vous supportez de l'infirme vieillesse
Le bavardage et la caducité.
C'est par ces traits que votre âme accomplie
A par estime acquis de vrais amis;
Ne pensez point qu'Amour, plein de folie,
Papillonnant, puisse en trouver parmis
Ces éventés que la débauche lie.
C'est sur l'estime et c'est sur les vertus
Que l'amitié véritable se fonde;