<252>Vos maréchaux disent bien le rosaire,
Mais d'être saint, ce n'est ma foi le tout.
Ne pouvez-vous, bon seigneur, à votre âge,
Sans consulter, suivre votre courage?
Et si pourtant demandez mon avis,
Je vous dirai que des saints je me moque,
Qu'ils ne sont bons qu'au benoît paradis,
Que leur secours était fort équivoque,
Et que par eux, au gré de nos souhaits,
Jusqu'à présent nous n'avons tous rien fait.
De Belzébuth j'éprouverais l'empire,
Aux Prussiens il donnerait du pire.
Vous voyez là le généreux Franquin,
Il sait assez de la sorcellerie
Pour évoquer ..... » - « Sainte Vierge Marie!
Cria Charlot, quel est votre dessein?
Laissons, laissons toute la diablerie.
Ne savez pas comme un jour Richelieu,
Chez Bonnevala tout haut reniant Dieu,
Et commettant certaine idolâtrie,
Pensa sentir les griffes du malin?
Qu'aurait-on dit, si cet esprit immonde
Eût enlevé brusquement de ce monde
Cet amoureux et coquet paladin?
Si je vous suis, je crois, Dieu me confonde,
D'avoir peut-être un plus cruel destin. »
Le fier Rosière insiste qu'il consulte
Les noirs démons, les ombres, les enfers.
Franquin lui dit : « Par ma science occulte
Je crois pouvoir ébranler l'univers. »
Le bon Charlot ne s'y résout qu'à peine,
Et, bégayant, il consent; on l'entraîne.
Proche du camp était un petit bois,
Lieu pacifique, asile solitaire;
Aux yeux du monde on pouvait s'y soustraire.
a Il s'agit ici du comte de Bonneval qui prit le turban à Constantinople en 1720, et y mourut pacha, en 1747. Voyez t. II, p. 37.