<269>Lors, d'un échange on forma le projet;
Contre un Lorrain on veut troquer Darget.
Au bon Charlot on proposa l'affaire,
Il y consent en prince débonnaire.
Ainsi Darget, aux Prussiens rendu,
Fut dans le camp en triomphe reçu;
Le bon Charlot ajoute à sa réponse
Que pour jamais dès ce jour il renonce
A ses desseins sur le palladion.
Ce mot des chefs éteignit la rancune;
Faisant cesser toute désunion,
Des Prussiens il combla la fortune.
Déjà la Mort, fille affreuse du Temps,
Réunissait, de tous les combattants
Que leur valeur fit périr sur ces rives,
Des deux partis les âmes fugitives.
Elle conduit ce peuple vers le ciel;
Chemin faisant, des morts le nombre augmente;
Il s'accroissait d'un tribut casuel
De l'univers, qui passait son attente.
Tous les états s'y trouvent confondus,
Maîtres, sujets, soldats, dévots, ministres,
Sages et rois, qui voyageaient tout nus;
En raisonnant de leurs destins sinistres,
Ils suivaient tous leur conducteur cruel,
Qui les mena vers le trône éternel.
Alors les morts passèrent en revue;
On y trouva mainte face inconnue,
Et maint visage encor tout effaré,
En hiéroglyphe alentour balafré.
Le Père alors se fait donner la liste
De tous ces morts à l'œil hagard et triste.
Là d'un chacun est la condition,
Le caractère et la profession;
Et, se suivant l'un et l'autre à la piste,
On les appelle un chacun par son nom.
Un tel fut roi; le Seigneur le condamne.