<29>Auprès de toi résidait Apollon,
Qui démeublait, pour remplir ton Lycée,
Son cabinet et même l'Hélicon.
Il appelait une ombre au haut placée;
C'était Horace, ami de la raison,
Qui, transporté du feu de son génie,
Chantait les vers de sa muse polie,
Et te disait :a « Choisis les meilleurs vins,
Crois-moi, ce soin à tout est préférable;
Les grands projets sont insensés et vains,
Car de nos jours le fil est peu durable. »
Auprès de lui Despréaux se rangeait,
Ami du sens et de l'exactitude,
Trop satirique et quelquefois trop rude,
Mais dont la lyre au Parnasse plaisait.
D'un air aisé Lucien le suivait,
Sage, plaisant et sans sollicitude,
Du haut du ciel tous les dieux dénichait,
Et librement sur leur compte riait.
Des bords du Pont, cherchant la compagnie,
Le tendre Ovide après ceux-ci venait,
Et des couleurs de son riche génie
Trop brillamment décorait l'élégie;
Avidement pourtant on le lisait.
Plus loin parut ce célèbre sceptique 7
Qui, bien armé de sa dialectique,
Dans un champ clos combattit les docteurs,
Jusques à bout poussa le fanatique,
Et foudroya l'orgueil théologique,
En détruisant le règne des erreurs.
Là, j'aperçus le vieux bonhomme Homère,
Qui, se voyant obscurci par Voltaire,
Dans son poëme avec soin se cachait,
Et des ligueurs l'Iliade couvrait.
Au-dessus d'eux, en belle reliure,
7 Bayle.
a Odes, I, 11, A Leuconoé.