<6>Il sert cent mets, qui courent à la ronde :
« Que le plaisir s'empare de céans,
Dit-il; messieurs, chez moi la joie abonde. »
Corinne jeûne, et pour tout un million
Ne goûterait de cette sauce fine :
Elle pourrait laver le vermillon
Qui fait l'éclat de sa lèvre divine.
Si Marianne au visage poupin
Ne mange pas un seul morceau de pain,
C'est qu'en son corps étroitement serrée,
Elle craint trop que la galimafrée
Pourrait gâter le corsage divin
De cette taille en tous lieux admirée.
A l'autre bout, sans s'en embarrasser,
Le comte mange à se déboutonner,
De tous les plats goûte l'un après l'autre,
Avec Hamoch se met à raisonner;
D'Apicius le comte est grand apôtre,
Et les Neversa pourraient le consulter.
Julie enfin rompt ce cruel silence,
Et, se tournant, dit d'un air d'indolence :
« Ah! c'est affreux, tout ce jour il a plu;
En vérité, c'est un nouveau déluge. »
Merlin répond : « Tout comme vous j'en juge,
Et l'almanach ainsi l'a résolu. »
Merlin dit bien, ce docte personnage
De son savoir fait un riche étalage;
Hors l'almanach, jamais il n'a rien lu.
Le discours tombe, on bâille; on prend courage,
On le relève, on parle de pompons,
De gants glacés, coiffures et jupons,
Et l'on médit un peu de Rosalie;
Elle est absente, et la noire Sylvie
Ne trouve rien d'aimable en sa beauté.
Ne croyez pas que ce soit par envie :
a Voyez t. X, p. 115.