<19>Mais n'avez-vous, cruels, que l'étranger à craindre?
Le péril est pressant, il n'est plus temps de feindre;
Regardez le Danube enfanter vos tyrans.
Tandis qu'aveuglément votre audace me brave,
La liberté s'indigne, et ses regards mourants
Pleurent un peuple vil qui veut se rendre esclave.
Ah! détestez vos écarts;
Votre étrange fanatisme
Va fonder le despotisme
Qu'ont préparé vos Césars.

Leur noire ambition vous a tendu le piége;
Ah! que, près d'y tomber, la raison vous protége!
Rougissez de servir de lâches instruments
Au tyran dont l'orgueil guida votre vaillance,
Et ne cimentez point les secrets fondements
D'une trop rigoureuse et durable puissance.
Vous triomphez aujourd'hui.
Enivrés de votre gloire;
Hélas! de votre victoire
Les fruits ne sont que pour lui.

Que des antiques faits le récit vous éclaire.
Voyez-vous Charles-Quint, dans son destin prospère,
Des Germains divisés chef trop ambitieux,
Par ses fiers Espagnols subjuguer vos provinces,
A son joug absolu façonnant vos aïeux,
Enchaîner à son char vos plus illustres princes;
Et bientôt Ferdinand trois,
Versant le sang hérétique,
Par son pouvoir tyrannique
Prêt à supprimer vos lois?

Mais je vous parle en vain, mes discours vous déplaisent.
Répondez, malheureux .... Les perfides se taisent;
Ils ont dégénéré de l'antique vertu,
Leur liberté, qu'enchaîne une main insolente,