<210>Obéissez encore aux lois de votre maître.
J'approche de ma fin, je ne suis déjà plus;
En quittant de mes sens les fragiles tissus,
Le cœur rempli de vous, ma dernière pensée,
Ma dernière prière à nos dieux adressée
Sera qu'après ma mort ils daignent dignement
Payer votre tendresse et votre attachement,
Et que, vous accordant un sort toujours prospère,
Ils fassent envers vous ce qu'Othon n'a pu faire.
Vous bénirez mon sort; la mort n'est point un mal,
Le genre humain lui paye un tribut général.
Heureux celui qui peut, quittant cette demeure,
Du sceau de la vertu sceller sa dernière heure!
Si notre esprit s'éteint au moment du trépas,
Il n'est plus de douleurs, de soins, ni d'embarras;
Si le coup qui détruit cette fragile trame
N'est point assez puissant pour atteindre à mon âme,
Je trouverai des dieux aux pervers peu connus,
Dieux rémunérateurs de nos faibles vertus.
Adieu, je vais quitter ma dépouille mortelle,
Et jouir dans les cieux d'une gloire éternelle.
Fait à Strehlen, le 1er décembre 1761.