<33>Redoublent mes regrets,
Et des pompes funèbres
Couvrent nos faits célèbres
De lugubres cyprès.
Vous cimentez d'un sang à vos regards servile
Votre gloire abhorrée, atroces conquérants.
Les humains sont-ils donc d'une espèce assez vile
Pour s'égorger entre eux au gré de leurs tyrans?
Mais vos cœurs endurcis et façonnés aux crimes
Méprisent ces guerriers, généreuses victimes
Offertes au trépas,
Et dans vos jeux infâmes
Vous perdez cent mille âmes
Pour gagner des États
Voyez ce peuple en deuil, ces femmes désolées
Dont les sanglots amers réclament leurs enfants;
D'aussi vives douleurs sont-elles consolées
Par l'espoir d'amasser leurs tristes ossements?
Rois, écoutez ces cris, que vos cœurs en gémissent :
Ces soupirs douloureux, ces voix qui vous maudissent,
Sont un prix réservé
A tout tyran farouche
Qu'aucun malheur ne touche
Qu'il n'a point éprouvé.
Je te perds donc aussi, doux espoir de ma vie,
Prince aimable, que Mars aurait dû préserver
Des flèches du trépas que lançait en furie
Le parricide bras que ton cœur sut braver!
Sur la fin de mes jours, ma vieillesse pesante
A pu ravir à peine à la mort dévorante