<102>C'est, de nos jours, sous cet illustre nom
Que dans le monde il fait son ministère :
Il rajeunit une vieille guenon,
D'un monstre fée, égal à Carabosse,
Par son grand art il aplanit la bosse,
D'une grisette il fait une Junon,
De Messaline un pudique tendron;
Il prend ainsi dans son piége bizarre
L'ambitieux, le prodigue, l'avare,
Le jouvenceau digne d'autres plaisirs,
Et le vieillard qui n'a que des désirs.
De plus, Hymen a certain personnage
Plus séduisant, plus adroit, plus trompeur,
Qui, pour grossir la cour de son seigneur,
S'en va criant : Jeunesse, qu'on s'engage!
Chez notre dieu se cueille cette fleur
Qu'Amour flétrit de son souffle volage,
Que peu d'humains reçoivent en partage;
Ce don des dons vous vient de la pudeur,
Qui va former les nœuds du mariage.
Mais ces liens, par ce fourbe noués,
Et des deux parts rarement avoués,
Furent forgés sous le sinistre auspice
D'un vieux cyclope, aux gouffres de l'Etna.
Certain démon tout pétri de malice,
Pour nous punir, à l'Hymen les donna,
Et celui-ci sans compliment enchaîne
Ces insensés qu'un fourbe conducteur
Dans son palais tous les matins emmène,
Qui, bientôt las d'une éternelle gêne,
Pleins de dépit, brisent avec fureur
Ces fers cruels qui causent leur malheur.
Tels sont les dieux que l'univers adore,
Leurs lois, leur culte et leur religion.
Décidez-vous, il en est temps encore;
Entre ces dieux il faut de l'option.