<129>Vous le voyez, mon âme est trop humaine
Pour se complaire aux dangers, à la peine
Qu'aux ennemis un guerrier fait souffrir.
Citoyen doux des sources d'Hippocrène,
J'aimerais mieux, si j'avais à choisir,
Passer mes jours près de ma souveraine,
A recevoir et donner du plaisir.
A ce propos, ma divine maîtresse,
Je vous dirai le mot d'un ancien;
Russe n'était, ni même Autrichien :
« Dieu me fit homme, ainsi je m'intéresse
Aux biens, aux maux de toute notre espèce. »

Dittmannsdorf, 6 août 1762.

VIII. RÉPONSE A MA MAITRESSE.a

Ah! que je chéris les monarques,
Lorsque vous les faites parler!
S'ils pouvaient tous vous ressembler,
Les cours n'entendraient plus la voix des Aristarques
En vaines plaintes s'exhaler;
La triste vérité, qu'on voudrait exiler,
Publiant toutes ses remarques,
N'aurait rien à dissimuler.
Ces rois auraient le don de plaire
Et l'art plus précieux de régner sur les cœurs,
Par là cent fois supérieurs
A tout monarque sanguinaire


a Voyez t. XII, p. 266 et 267.