<135>Dont vous me voyez enchanté.
L'objet charmant que je révère
Est le chef-d'œuvre de Cythère.
De tant de concurrents pleins de rivalité,
Je suis l'heureux élu que votre humanité
Veut rendre seul dépositaire
De cet inestimable et précieux trésor.
Nouveau Jason, j'emporte enfin la toison d'or;
Mon bonheur est plus grand que celui d'un monarque
Qui végète dans la grandeur.
Je sais aimer, j'ai même un cœur
Aussi sensible que Pétrarque,
Et je devrai, ô mère! uniquement à vous
Le comble de mes vœux et d'un destin si doux.
Mais un certain soupçon m'agite :
Vous vous cachez de moi, vous êtes Amphitrite,
De votre sein naquit Vénus;
Et pour vous encor dire plus,
Ma muse, chez Ovide instruite,
Dans la belle Ulerique en voit les attributs.
Ma conjecture va trop vite;
Ne seriez-vous pas Jupiter,
Qui par la tête, un jour, accoucha de Minerve?
Car votre fille, que j'observe,
En a la sagesse et tout l'air.
Je le vois bien, votre origine
Est toute d'essence divine,
Et d'Anchise et de moi les destins mutuels
Seront de nous unir au sang des immortels.
Dès que l'hymen à votre fille
M'aura donc pour jamais joint à votre famille,
Je vous dresserai des autels.