<190>Viens m'inspirer, ô féconde Folie!
Fais retentir ta marotte à grelots.
C'est par tes soins que des fous et des sots
La balourdise et l'histoire embellie
Peut quelquefois nous fournir des bons mots.
Raconte-moi, pour dilater ma rate,
Comment tu pus, dans l'empire sarmate,
Bouleverser les cerveaux des magnats.
On dit, et c'est, je crois, par médisance,
Que la besogne était faite d'avance,
Que, sans trouver de trop grands embarras,
Dans un terrain si propre à ta semence,
Tout produisit ce qu'alors tu semas.
Or, écoutez, mon illustre auditoire;
Voici comment le trouble commença.
Auguste trois allait dans la nuit noire,
Roi très-fameux, qui jamais ne pensa,
Pour y trouver sa chère Tisiphone,
Épouse dont il était obsédé,
Minois charmant, calqué sur la Gorgone,
Qui dans l'enfer déjà l'a précédé.
Fallut remplir dignement cette place,
La république avait besoin d'un roi.
Des Jagellons éteinte était la race;
On voulut donc, pour maintenir la loi,
En choisir un tiré d'une autre classe.
Le Polonais, toujours intéressé,
En voulait un qui fût panier percé,
Et qui parût à ses désirs avides
Le vrai tonneau, tourment des Danaïdes.
Tout juste alors on apprit un matin,
Par le corneur qui suit la Renommée,
Son écuyer, le Courrier du Bas-Rhin,
Que la Sottise, inquiète, alarmée
De n'avoir pu visiter dès longtemps
Les habitants que le Grand Turc enchaîne,
Et le Polaque, enfant de son domaine,