<218>Rezzonico, le pape alors régnant,
Et du mufti zélateur fanatique,
En fut saisi d'une terreur panique
Et telle enfin que si lors, sur-le-champ,
La foudre avait brûlé le Vatican.
« Hélas! hélas! sort cruel, sort inique!
Ce désarroi est un tour diabolique,
Dit le saint-père; il faut incessamment
Faire exposer notre saint sacrement. »
Le lendemain, processions se firent,
A mille autels grandes messes se dirent;
Et dans l'ardeur qui le peuple animait,
Il priait Dieu de bénir Mahomet.
Pour le dervis s'intéressait l'évêque,
On confondait et la Vierge, et la Mecque,
Et dans les murs de la sainte Sion
N'étaient que pleurs et désolation.
Rome prétend que la douleur amère
Du contre-coup qui frappa le bateau
Ou la nacelle où jadis rama Pierre,
En épuisant les forces du saint-père,
Vous le coucha tout pleurant au tombeau.
Mais en Pologne, ô Dieu! qu'on vit de larmes
Couler des yeux des bons confédérés!
Tout ébaubis et les cœurs déchirés,
Leurs mains allaient laisser tomber les armes.
« Se peut-il donc qu'on traite comme nous
L'amas nombreux d'un peuple formidable? »
Se disaient-ils. La peur les rendit fous.
Hélas! jadis leur bras fut redoutable,
Quand ils venaient étriller nos aïeux;
Mais quand le Turc nous devint secourable,
Le Russe ardent, et plus que lui fougueux,
L'a dissipé comme les grains de sable
Que pousse et chasse un vent impétueux.
Plus consternés paraissaient en Hongrie
Les palatins cachés dans Épérie.