<222>Vois, examine, et fixe ici tes yeux
Sur Stanislas, triste roi de Pologne,
Chargé d'ennuis, accablé de besogne;
Vois si ton cœur peut l'appeler heureux.
De ses foyers un assassin barbare,
La nuit, l'enlève,a et par un bonheur rare,
Il se dérobe à ses bras furieux.
Ah! mon bon roi, moi-même je m'accuse;
Je t'ai parfois traité trop durement.
J'en suis contrit. Mon impudente muse
Te déchira de son style mordant.
Oui, j'en ressens componction très-grande;
Je veux partir, je veux incessamment
A Czenstochow faire honorable amende.
Il ne faut point, dans de frivoles jeux,
En folâtrant frapper les malheureux.
Mais ce bon roi, sur le trône peu ferme,
De ses malheurs n'a pas atteint le terme.
Le fait est clair, car tous ces grands magnats,
Ce vil conseil composé de Midas,
N'ont d'autre but, au château d'Épérie,
Que de troubler et ruiner leur patrie,
Quoique d'ailleurs accablés d'embarras.
Le désarroi du Turc en Moldavie,
Sa fuite enfin, sa longue léthargie,
En les privant du plus ferme soutien,
Les laissait là ne tenant plus à rien.
S'élève alors monsieur de Cracovie,
Pontife ardent, mais plein de prud'homie;
Comme en sursaut sortant d'un long sommeil,
Il parle ainsi : « Pour le bien de l'Église
Voyez de quoi ma bonne âme s'avise;
Sur tous les points suivez donc mon conseil.
Dans nos malheurs la ferveur est de mise;
Invoquons tous notre divinité,
Et qu'on implore à grands cris la Sottise.


a Le 3 novembre 1771.