<292>LE MARQUIS.

Mais ne vois-tu pas qu'il est cent choses qu'un homme du monde est obligé de faire pour se conformer au goût public, au torrent de la nouveauté et de la vogue qui l'entraîne? Julie n'a rien de piquant pour moi, mais il me la faut pour me mettre au niveau du beau monde. La philosophie m'ennuie à la mort, et, à te parler franchement, je n'y comprends rien; mais je craindrais d'être montré au doigt par les rues même, si je ne disais, Je suis philosophe, si je ne parlais de Newton, que je ne susse discourir des Éphémérides, et nommer beaucoup d'autres mots inintelligibles dont je suis venu à bout de posséder le jargon, quoique avec beaucoup de peine; et j'aimerais mieux périr que de ne point suivre en tout ce que je vois qui se pratique. Les coutumes du public sont respectables, il faut les respecter, il faut les respecter.

LA RÉJOUISSANCE.

Que je vous plains, mon maître, de donner dans ces travers! Pourquoi ne point être naturel et suivre vos goûts? Soyez original, et ne copiez point de si mauvais originaux. Si nous allions au pays des cigognes, vous voudriez avoir un long bec et de grands pieds rouges.

LE MARQUIS.

Ce n'est pas à toi de m'apprendre ce que je dois faire. Acquitte-toi seulement bien des commissions que je te donne, et retourne d'abord chez Julie, (il écrit avec du crayon.) et porte-lui ce billet.

(La Réjouissance s'en va.)

SCÈNE IX.

LE MARQUIS, VERVILLE, M. BARDUS.

VERVILLE.

Bonjour, marquis. Ne sois point surpris que je t'aie fait faux bond aujourd'hui; j'ai été arrêté à la cour par un duc de mes amis, et j'ai engagé ma parole d'y retourner ce soir. On célébrera