<41>De quereller tout haut son astre et son destin?
Ce n'est pas en jurant que son chemin se change,
Que ses pieds embourbés se tirent de la fange;
Son esprit agité devient un imposteur,
Il augmente sa peine et grossit son malheur.
C'est par présomption que notre cœur murmure,
Nous sommes tous comblés des dons de la nature;
Mais des présents du ciel l'homme peu satisfait
Veut jouir sans chagrin d'un bonheur plus parfait.
Il ne lui suffit point que le soleil l'éclaire,
Ses vœux sont plus hardis; son cœur plus téméraire
Veut un air toujours pur, des cieux toujours sereins.
Nous sommes nés sujets et non pas souverains.
Quelle est donc la raison que cet homme en furie
Dans ses fougueux accès se démène et s'écrie :
Je suis trop malheureux, je suis infortuné?
Un pointeur hasardeux au jeu l'a ruiné;
Du sein de la mollesse il vole à l'indigence.
Mais le ciel, après tout, te doit-il l'abondance?
Te doit-il tous les biens avec la volupté?
Il te donne bien plus, t'accablant de santé,
Et ce Crésus dont l'or remplit ton cœur d'envie
Troquerait avec toi pour jouir de la vie.
Cet hypocondre obscur et chargé de vapeur
Du sombre désespoir respire encor l'horreur.
Il pense que du ciel la main appesantie
Le poursuit par fureur et par antipathie.
En accusant le ciel, reconnais ses bienfaits;
Tous les dons qu'il te fit pour toi n'ont plus d'attraits?
A tes chagrins présents uniquement sensible,
Ton âme à ses faveurs est donc inaccessible?
Les biens qu'il répandit pour assouvir tes sens,
Tes trésors, tes emplois, tes amis, tes enfants,
D'un mal peu dangereux l'atteinte passagère,
Les efface à l'instant de ton âme légère?
Aussi lâche qu'ingrat, ton cœur impatient
Est si peu courageux que peu reconnaissant.