<27>baguette je fais des serpents; et j'excelle surtout dans le secret admirable de créer des poux. Quiconque voudra participer à mes belles connaissances n'a qu'à s'annoncer; je lui couperai un petit bout de peau, et il sera semblable à moi-même. Sitôt les femmes lui apportent des enfants, et s'empressent à qui sera la première dont le fils sera opéré. Cette cérémonie causa plus de dégoût que d'édification; cependant tout le monde était content. Son Gille, qui avait nom Ézéchiel, était nu comme un singe; il avait le dos bâté. Tout le peuple riait en le voyant déjeuner d'une tartine dont l'odeur infectait toute l'assemblée. Le Gille soutenait que cette nourriture, en fortifiant les yeux, leur donnait la faculté de percer dans l'avenir; cependant personne ne voulut avoir part à son déjeuner. Son voisin, charlatan d'un autre genre, criait de toute sa force : Fuyez cet empirique, qui vous trompe; abandonnez-le pour venir chez moi; c'est uniquement chez moi que réside l'infaillibilité; mes remèdes ont des vertus suffisantes et efficaces. Les substances disparaissent à ma voix, quoique les accidents se conservent. Selon mon calcul, trois font un, cela est évident. Au lieu que mon voisin vous coupe et vous taille, je me contente de vous asperger d'eau et de saigner vos bourses; rien de plus malsain, de plus pernicieux qu'une bourse pleine. Vous pouvez acheter chez moi des spécifiques pour les maladies les plus dangereuses, comme, par exemple, pour le mal du purgatoire; j'ai des sachets remplis d'ossements, bons pour les terreurs paniques, et des élixirs d'indulgence, qui atténuent les maux les plus violents et les plus atroces. Son loustic était un balourd qui, pour amuser le peuple, se faisait donner de grands coups de barre sur la poitrine; il se nommait Augustinet; il dansait en clopinant autour d'un tombeau, et faisait des momeries qui amusaient le peuple et me paraissaient de la plus plate espèce. Je remarquais toutefois avec étonnement qu'à ce théâtre les bourses des spectateurs se vidaient, et que celle du charlatan se remplissait à bouffir. Ce peuple n'existait qu'en imagination; il vivait dans les siècles futurs, et se pavanait d'avance de la santé dont il pourrait jouir après des siècles révolus. Ma curiosité m'entraîna tout de suite vers une autre boutique dont l'empirique, à l'air sombre et refrogné, se déchaînait impitoyablement