<55>troupeau de brebis saint Jean, le bienheureux précurseur de Jésus-Christ. Lui-même avait la douceur des brebis, et il venait annoncer au genre humain abruti par ses crimes l'agneau sans tache. Si notre auteur sacré avait vu de ses yeux accomplir tout ce qui précéda la venue bienheureuse du Messie, il n'aurait pu narrer les événements avec plus d'ordre qu'il ne les expose dans cette parabole; c'est plutôt une histoire qu'une prophétie. Nous touchons enfin au moment où la terre en travail va enfanter son Sauveur. Barbe-bleue, ou disons plutôt le diable en fureur, vient et veut saisir sa proie.
Anne annonce dans ce moment à sa sœur qu'elle voit venir deux cavaliers, mais qu'ils sont encore éloignés. Ces deux cavaliers sont le Fils et le Saint-Esprit, différents de personne, qui, tous deux indissolublement unis au Logos, composent la très-sainte et très-adorable Trinité. Quand arrivent-ils? Dans un temps où tout le monde jouit de la paix, dans le temps qu'Auguste ferma le temple de Janus; mais d'autre part aussi dans le temps que toutes les puissances de l'enfer faisaient la guerre la plus vive à leur Créateur, lorsque les prêtres, les lévites et les docteurs de la loi étaient partagés en différentes sectes d'une philosophie damnable, qui se produisaient sous le nom de pharisiens, d'esséniens, de saducéens et de thérapeutes, qui sapaient et détruisaient si bien la foi de leurs ancêtres, que Sabaoth n'avait presque plus de vrais adorateurs. Le péril était éminent, il fallait un prompt secours, ou la jeune épouse aurait été égorgée, et l'Église détruite; mais Sabaoth n'abandonne pas ses fidèles. Dans le moment que Barbe-bleue porte le glaive au cou de son épouse, voilà le saint des saints qui arrive, qui le terrasse, et qui abat Lucifer à ses pieds. L'Église est sauvée, et l'enfer en frémit de rage. Voyez combien cette allégorie est exacte, et combien les paroles de l'auteur sacré sont infaillibles. Les saints et les prophètes, auxquels le ciel a révélé les événements futurs, les ont annoncés. La faible raison humaine n'a pu percer l'écorce qui couvrait ces pieuses vérités. Il a fallu que tout s'accomplît pour la convaincre. C'est le sens mystique qu'il faut chercher dans les saintes Écritures, ou l'on n'aura jamais l'intelligence de Jérémie, d'Ésaïe, d'Ézéchiel et de Daniel, ni de Barbe-bleue, ni du Can-